Le 17 septembre 2024 - 9 min de lecture - Crédit photo @Adobesotck 

Puis-je exercer une activité de location "Airbnb" au sein d'une copropriété comportant une clause d'habitation bourgeoise ?

La perspective de rentabilité d’une activité « Airbnb » par rapport à une location « classique » attire de nombreux propriétaires et investisseurs. 

Au préalable, il est nécessaire de procéder à plusieurs vérifications afin de s’assurer qu’une telle activité est possible (Suis-je situé dans un secteur où l’activité Airbnb est autorisée ? Dois-je solliciter un changement de destination et/ou d’usage auprès de la mairie ou la préfecture ?).

Mais le propriétaire d’un lot situé au sein d’une copropriété doit aussi et surtout vérifier que son activité est conforme au règlement de copropriété. 


 

L'imprécision des règlements de copropriété quant à l'exercice d'une activité "Airbnb" 

L’activité de location de meublés de tourisme, sur des plateformes telles que Airbnb, consiste à mettre en location un logement meublé servant au séjour d’une personne n'élisant pas domicile pour une période définie à la nuitée, à la semaine ou au mois. (L. 324-1-1 du code du tourisme)

Cette activité dite « Airbnb » se situe dans une zone grise : entre l’activité civile de location pour une habitation pérenne et l’activité commerciale de location touristique (à l’instar des hôtels).

Aujourd’hui se pose la question de la qualification de cette activité.

Pourquoi ? 

Car de nombreux règlements de copropriété interdisent l’exercice d’une activité commerciale dans tout ou partie de l’immeuble. 

Ces règlements prévoient une clause d’habitation bourgeoise, c’est-à-dire autorisant l’occupation pour un usage exclusif d’habitation (clause bourgeoise « exclusive ») ou avec seulement une tolérance pour l’exercice d’une activité libérale (clause d’habitation bourgeoise « simple »).

Quid alors d’une activité Airbnb, ni autorisée ni interdite explicitement par ces règlements qui ont été rédigés pour la plupart à une époque antérieure à l’essor du meublé de tourisme ? 

 

Une nécessaire appréciation au cas par cas selon les dispositions du règlement de copropriété et l'emplacement du bien

 

L’autorisation de l’activité « Airbnb » pour le bien situé en zone touristique

Depuis l’essor des locations en meublé touristique, les juges ont régulièrement fait évoluer leur position. 

La Cour de cassation a récemment autorisé une activité de location meublée touristique, type Airbnb, dans un immeuble comportant une clause d’habitation « bourgeoise » (Cass. 3e civ. 25 janv. 2024, n° 22-21.455). 

Elle retient que l’activité de location meublée touristique n’est pas une activité commerciale, dès lors que cette activité n’est pas accompagnée de prestations de type para-hotellières exercées à titre principal mais seulement accessoire. 

Une activité est qualifiée de para-hôtelière lorsque 3 des 4 services suivants sont fournis à titre principal : le petit-déjeuner, le nettoyage régulier des locaux, la fourniture de linge de maison et la réception, même non personnalisée, de la clientèle. (Article 261 D – 4° du CGI)

Toutefois, l’arrêt rendu par la Cour de cassation vise un lot de copropriété situé dans une zone touristique (station de ski). 

Une telle localisation explique la position des juges, plus enclins à encourager l’activité de meublé touristique, et donc les Airbnb, dans une zone qui est elle-même touristique. 

Une appréciation au cas par cas est donc nécessaire, comme le souligne la doctrine. (Loyers et copr. n° 3 du 01/03/2024, A. Lebatteux, La location touristique meublée et la destination bourgeoise de l’immeuble ; Loyers et copr. n° 6 du 01 /06/2024, C. Coutant-Lapalus, Locations meublées touristiques de courte durée et respect de la destination de l’immeuble)

 

L’interdiction fréquente de l’activité « Airbnb » par les juges du fond 

A l’inverse, plusieurs jugements ont récemment retenu que l’activité de location de meublé touristique enfreint les dispositions du règlement de copropriété comprenant une clause d’habitation « bourgeoise ».

Ces copropriétés ne sont pas situées dans des zones touristiques (ex : station balnéaire ou de ski) et leur règlement prévoit : 

  • Un usage d’habitation avec la possibilité d’exercer une activité libérale sous réserve que le nombre de visiteurs soit limité et que les parties communes soient usées bourgeoisement, 
  • l’interdiction des professions libérales bruyantes, telles que musicien ou professeur de chant,  
  • l’information du syndic par le copropriétaire bailleur à chaque nouvelle location, 
  • des locations consenties uniquement à des personnes de bonne vie et mœurs, (TJ Paris 29 fév. 2024 n° 21/03182, n° 22/02321, 4 avr. 2024, n° 22/02674, 23 févr. 2024, n° 21/11598)

Dans ces jugements, les juges continuent d’ailleurs de retenir la nature commerciale de l’activité de location meublée touristique exercée (cf. également TJ Marseille 4 juin 2024, n°23/01710). 

 

Quelles leçons en tirer ? 

Le propriétaire confronté à une clause d’habitation bourgeoise dans son règlement de copropriété doit, d’une part, étudier les différents dispositions de ce règlement et, d’autre part, s’interroger sur la localisation touristique ou non de son bien. 

A la suite de cette analyse, il pourra envisager ou non d’exercer une activité « Airbnb ». 

Une validation de son activité par le syndic, et, encore mieux, une autorisation d’assemblée générale des copropriétaires, seront bien entendu des éléments considérables pour lui donner plus de confort. 

 

Vers davantage d’interdictions de l’activité « Airbnb » ? 

Depuis le mois d’août 2024, l’administration fiscale endurcit sa position en considérant de manière quasi-systématique que l’activité de meublé touristique est une activité « para-hôtelière » donc commerciale. Une telle appréciation entraine d’ailleurs son assujettissement à la TVA. 

En effet, les 3 des 4 critères nécessaires à la qualification d’une activité para-hôtelière sont désormais beaucoup plus facilement remplis. (cf. BOI-TVA-CHAMP-10-10-50-20 07/08/2024)

Si les juges ont choisi de ne pas se référer exclusivement à ce critère fiscal pour déterminer le caractère civil ou commerciale d’une activité Airbnb, cette évolution de la doctrine fiscale peut inciter les juges à davantage retenir la qualification commerciale à l’activité « Airbnb » et donc à interdire cette activité en présence d’une clause d’habitation bourgeoise…

Compte tenu de ce changement et du caractère très évolutif de la jurisprudence, la plus grande vigilance sera requise concernant les prochains jugements et arrêts rendus.


 

 

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